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26 mars 2007 1 26 /03 /mars /2007 15:54

La bataille de l’histoire autour du sens des luttes relatives aux questions sur la grâce et sur le jansénisme au tournant des XVII et XVIIIe siècle

 

Les historiens jansénistes ou favorables au jansénisme :

 

Cas de conscience proposé par un confesseur de province, touchant un ecclésiastique qui est sous sa conduite et résolu par plusieurs docteurs de la faculté de théologie de Paris, Liège, 1702.

Dom Gerberon,  janséniste, Histoire générale du jansénisme, Amsterdam, 1700, 3 vol.

Dom Gerberon, éd., Bay, Michel, Opera cum bullis pontificum, Cologne, 1696.

Dom Gerberon, sous le pseud de Duvivier, Lettres de M Cornelius Jansenius, évêque d’Ypres et de quelques autres personnes, à M Jean Du Verger de Haurane, Cologne, 1702.

Dupin, Louis-Ellies, Histoire ecclésiastique du dix-septième siècle, Paris, Pralard, 1714, 4 vol.
Fouillou, Jacques , Chimère du jansénisme ou Dissertation sur le sens dans lequel les cinq propositions ont été condamnées. Pour servir de réponse à un écrit, qui a pour titre : Deuxième défense de la constitution, Vineam Domini Sabaoth, s.l., 1708.

Fouillou, Jacques, Chimère du jansénisme ou dissertation sur le sens dans lequel les cinq propositions ont été condamnées, s.l., 1708

Fouillou, Jacques, Louail, Jean,  Joncoux, Françoise-Marguerite de,  Histoire abrégée du jansénisme, s.l., 1697.

Joncoux, Louail, Quesnel, Petitpied, Fouillou, jansénistes, Histoire du cas de conscience, Nancy, 1705-1711, 8 vol.

Perrault, Charles, Les Eloges de MM Arnauld et Pascal, composés par M. Perrault, de l’Académie française, imprimés d’abord et supprimés ensuite par la cabale de quelques envieux de la gloire de ces deux grands hommes, Cologne, 1697.

Petitpied, Nicolas,  De l’injuste accusation de jansénisme, Paris, 1702.

Quesnel, Pasquier,  Histoire de la vie et des ouvrages de M Arnauld, augmentée en cette édition d’un grand nombre de pièces sur le même sujet, Liège, 1697.

Quesnel, Pasquier, Causa Arnaldina, seu Antonius Arnaldus, Leodici Eburonum, 1699.

Quesnel, Pasquier, Histoire abrégée de la paix de l’Eglise, Mons et Amsterdam, 1698.

Quesnel, Pasquier, Histoire abrégée de la vie et des ouvrages de M Arnauld, Cologne, 1695, augmentée, Cologne, 1697.

Quesnel, Pasquier, Histoire du formulaire qu’on fait signer en France et de la paix que le pape Clément IX a rendue à cette Église en 1668, s.l., 1698.

Quesnel, Pasquier, Justification de M Antoine Arnauld, Liège, 1702.

Quesnel, Pasquier, La Paix de Clément IX, ou Démonstration des deux faussetés capitales avancées dans l’ « Histoire des V propositions » contre la foi des disciples de S. Augustin et la sincérité des quatre évêques, avec l’histoire de leur accommodement, et plusieurs pièces justificatives et historiques, Chambéry, 1700.

Quesnel, Pasquier, Le Père Bouhours, Jésuite, convaincu de ses calomnies anciennes et nouvelles contre Messieurs de Port-Royal, s.l., 1700.

Recueil des plus belles pièces qui ont été composées en prose et en vers, en latin et en français, par différents auteurs, à la gloire de feu M Arnauld, docteur de Sorbonne, s.l., 1694.

Réflexions sur les constitutions et brefs de nos saints pp. Les papes Innocent X Alexandre VII et Innocent XII. Touchant la condamnation des cinq propositions faites sous le nom de Jansenius évêque d’Ipres. Cologne, Jean Druckerus, 1699.

Serry, Hyacinthe, dominicain sous le pseud. De l’abbé Le Blanc, Historiae congregationum de Auxiliis divinae gratiae, Louvain, 1700.

Serry, Hyacinthe, dominicain,  L’Histoire des congrégations de Auxiliis, justifiée contre l’auteur des Questions importantes, Louvain, 1702.

Varet, Alexandre, janséniste, relation de ce qui s’est passé dans l’affaire de la paix de l’Eglise sous Clement IX avec les lettres, actes, mémoires et autres pièces qui y ont rapport, s.l. ,1706

 

Les auteurs défavorables aux jansénistes :

 

Germon, Barthélémy, jésuite,  Question importante à l’occasion de la nouvelle histoire des congrégations de Auxiliis, Liège, 1700.

Germon, Barthélémy, jésuite, Lettre à M l’abbé Le Blanc, sur la nouvelle Histoire des disputes de Auxiliis, qu’il prépare, Liège, 1698.

Lallemant, Jacques-Philippe, (jésuite),  Le père Quesnel  séditieux et  hérétique, s.l., 1705.

Lallemant, Jacques-Philippe, Le véritable esprit des nouveaux disciples de Saint-Augustin, 1706.

Le Jansénisme abattu, s.l, 1707.

Le Tellier, Michel, jésuite, Recueil historique des bulles et constitutions, brefs, décrets et autres actes concernant les erreurs de ces deux siècles, tant dans les matières de la foi que dans celles des mœurs, depuis le saint Concile de trente jusqu’à notre temps, s.l., 1697.

Le Tellier, Michel, jésuite, sous le pseudonyme d’Hilaire Dumas, Histoire des cinq propositions de Jansénius, Liège, 1699, 2 vol., Trévoux, 3 vol.

Le Tellier, Michel, sous le pseudonyme d’Hilaire Dumas, Défense de l’  « Histoire des cinq propositions de Jansénius », Liège, 1701.

Lievin de Meyere, jésuite, pseud Liborius Gratianus et theodorus Eleutherius, Historiae controversiarum de divinae gratiae auxiliis susb summis ponti ficibus sixto, clemente VIII et Paulo V adversus histsoriam sub nomine Ausgustini Le Blanc, Anvers, 1705.

Susteren, H. J., von, jésuite,  Causa Quesnelliana sive Motivum Juris,…contra P. Paschalium Quesnel, Bruxelles, 1704.

Yse de Saleon, Jean d’, Le système entier de Jansénius et  des jansénistes renouvelé par Quesnel dans les cent une propositions extraites de son livre intitulé : Réflexions morales et condamnées par la Constitution, s.l., 1719.

 

Chronologie du réveil de la querelle janséniste à la fin du XVIIe siècle :

 
1671 première édition du livre du père Quesnel sous le titre d’abrégé de la Morale de l’Evangile. Approbation de l’évêque de Châlons par un mandement

 
1679 Mort de la duchesse de Longueville, Mgr de Harlay fait sortir les postulantes de Port-Royal

Arnauld se retire en Flandres

 
1682 Le clergé consacre par quatre articles la doctrine des libertés de l’église gallicane

1) les rois ne sons soumis pour le temporel à aucune puissance ecclésiastique

2) le concile général est supérieur au pape

3) l’usage de la puissance ecclésiastique doit être réglé par les canons

4) le jugement du pape n’est pas infaillible

 

18 oct. 1685 révocation de l’Edit de Nantes. Louis XIV révoque totalement l'Édit de tolérance signé à Nantes par son grand-père Henri IV en 1598

 
1685 ordre de la cour d’Espagne contre cinq docteurs de la faculté de Louvain, troubles à l’université et aux Pays-Bas

 
1691 Décret du Saint-Office contre le laxisme (à la suite de la querelle)

 
1693 les Réflexions Morales sont dénoncées au Saint-Office par les jésuites

 
1695 Mort d’Arnauld , mort de Nicole

 
1696 Mgr de Noailles succède à M Vialard dans l’évêché de Chalons et approuve les Réflexions Morales. Il est transféré à l’Archevêché de Paris.

 
1699 Cas de conscience signé de plus de 40 docteurs qui décident qu’on peut signer le Formulaire, quoi qu’on ne croie pas le fait de Jansénius. Ils supposent les conditions de la Paix
de Clément IX publiques et notoires et qu’on ne demande qu’un silence respectueux sur le fait.

 
1703 Ordonnance du cardinal de Noailles, arrêts du conseil, décrets et brefs de Rome, Mandements de plusieurs evêques contre le cas de conscience. Les docteurs de Sorbonne se rétractent ou sont exilés.

 
Mai 1703 le père Quesnel est arrêté à Bruxelles et renfermé dans les prisons de l’archevêché ainsi que dom Gerberon

 

Oct 1703 Ordonnance de l’évêque d’Apt contre le Nouveau Testament du Pere Quesnel

 
1704 Le Roi demande au Pape une constitution, qui déclare que le silence respectueux sur le fait de Jansénius n’est pas suffisant.

Quesnel s’évade des prisons de Bruxelles et se retire en Hollande

 
15 juillet 1707 Bulle Vineam Domini Sabaoth qui déclare qu’on ne satisfait pas aux  bulles par le silence respectueux

L’Assemblée du clergé la reçoit mais en déclarant qu’elle le fait par voie de Jugement et d’examen

Clément XI très irrité que l’assemblée ait voulu juger sa constitution, s’en plaint dans un bref au roi où il soutient que les évêques ne sont que les exécuteurs de ses décrets.

Septembre 1707 Les religieuses de Port Royal privée de sacrements par ordre du cardinal de Noailles

 
13 juillet 1708 Bref de Clément XI contre le Livre des Réflexions Morales

 
13 juillet 1709 Décret du Cardinal de Noailles pour la suppression du titre de l’abbaye de Port-Royal des Champs

 
8 août 1709 écrit intitulé problème sur le mandement du cardinal de Noailles du 15 avril précédent. On y fait voir la contradiction entre M de Fénelon, Archevêque de Cambrai, qui exigeait la foi divine sur le fait de Jansénius, et le cardinal de Noailles, qui ne demandait que la foi humaine.

 
Nov 1709 M d’Argenson lieutenant de police fait enlever toutes les religieuses de Port-Royal et les fait conduire en différents couvents

Ordonnance et instructions pastorales des évêques de la Rochelle et de Luçon contre les Réflexions Morales du Père Quesnel

 
1711 pareille ordonnance de l’évêque de Gap

Ordonnance du cardinal de Noailles contre ces trois mandements. Il interdit plusieurs jésuites de son diocèse

Lettre de l’abbé Bochart de Saron à l’evêque de Clermont, son oncle, découverte et rendu publique par laquelle on découvre le dessein du Père le Tellier d’engager les évêques à condamner le livre des Réflexions Morales et à écrire au roi contre le cardinal de Noailles, approbateur de ce livre.

Le roi écrit au pape, pour lui demander une bulle contre le livre des Réflexions Morales. Les évêques écrivent à Rome à ce sujet. Mémoire présenté à M le Dauphin par les évêques de Laon et de Langres qui se plaignent de ce qu’on porte à Rome une question de doctrine qui doit être décidée par les évêques en France.

Démolition de Port-Royal des Champs, les corps qui y reposaient sont exhumés

 
1712 Lettre du père Quesnel au Pape. Il le prie de ne pas le condamner sans l’entendre. Le Pape n’y a pas égard.

 
8 sept 1713 promulgation de la bulle Unigenitus par Clément XI

 
oct 1713 Le Roi fait assembler les évêques qui se trouvent à Paris non pour l’examiner mais pour la recevoir.

 

 

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23 mars 2007 5 23 /03 /mars /2007 21:19

Point de vue de l’archevêché de Paris

DORSANNE (Antoine) - Journal de M. l'abbé d'Orsanne, docteur de Sorbonne, chanoine et chantre de l'Eglise de Paris, grand vicaire et official du même diocèse. Contenant tout ce qui s'est passé à Rome et en France, dans l'affaire de la Constitution Unigenitus, avec des anecdotes très intéressantes pour connaître les intrigues et le caractère de ceux qui ont demandé et soutenu la dite constitution, aussi bien que de tous ceux qui y ont eu part.
À Rome, Aux dépens de la Société, 1753-1756, 7 vol. in-12.

 
L'auteur fut un soutien constant de son chef, le cardinal de Noailles, à l'instigation duquel il nota "jour par jour ce qui se passait". Dans la querelle provoquée par l'acceptation de la bulle Unigenitus, il a joué un rôle actif (...). Ce témoin oculaire s'y dévoile comme un homme désireux de trouver un accommodement, mais encore de ne pas laisser toucher aux libertés de l'Eglise gallicane. Aussi, estimant que celles-ci étaient atteintes par la bulle pontificale, se déclara-t-il fermement résolu à ce que l'acceptation "fût relative et indissolublement liée à des explications suffisantes pour mettre la vérité pleinement à couvert." Il convient donc de retenir les indications et même les jugements du grand vicaire, qui a été mêlé fortement aux controverses de l'époque, bien qu'on ne doive pas les accepter aveuglément." Est suivi au septième tome des Mémoires et instructions secrètes du C. de Noailles, envoyées à Rome sous le Pontificat de Benoît XIII.

 

Points de vues jansénistes

 
Louail (Jean) et Cadry (Jean-Baptiste), Histoire du livre des Réflexions morales sur le Nouveau Testament et de la constitution Unigenitus... Amsterdam : N. Potgieter, 1723-1734. 4 vol., in-4°. (plusieurs éditions, également in12).

Bourgoing de Villefore, (Joseph-François), Membre de l’Académie des inscriptions en 1706, (en démissionne deux ans plus tard), Anecdotes ou Mémoires secret sur la constitution Unigenitus, 1730-33, 3 vol.

Ouvrage supprimé comme janséniste par le Parlement de Paris

 
Point de vue jésuite :

 
LAFITEAU (Pierre-François) Réfutation des Anecdotes adressées à leur auteur par Messire Pierre François Lafitau, évêque de Sisteron, Gray, François Coüad, 1734, 3 vol.

 Il s'agit d'une réfutation des Mémoires secrets sur la Constitution Unigenitus de Bourgoing de Villefore..

et surtout du même, Histoire de la Constitution Unigenitus, 1737, 2 vol. (nombreuses éditions au courant du XVIIIe siècle)

 
Point de vue des défenseurs de la Constitution Unigenitus

 
T
HUILLIER, Vincent, dom, bénédictin de Saint-Maur, Fragment de l’Histoire de la Constitution Unigenitus, publié par le Père Ingold, Paris, 1901.

Correspond aux livres 7 à 13 du manuscrit conservé à la BN

  Bibliothèque Nationale, Fonds français : 

17731-17737. « Histoire de la Constitution Unigenitus Dei filius, donnée

par N. S. P. le pape Clément XI contre le livre des Réflexions morales sur

le Nouveau Testament, » par D. Vincent THUILLIER et D. LESUEUR.

(1550-1729.) Ms. original ; divisé en 36 livres.

XVIIIe siècle. Papier. 794, 699, 778, 739, 881, 702 et 258 pages. 350 sur

225 millimètres. D. rel. (Saint-Germain, Résidu 326-332.)

 

17738-17743. Copie du ms. précédent de l'Histoire de la Constitution

Unigenitus, de D. Vincent THUILLIER et D. LESUEUR. (1550-1729.)

XVIIIe siècle. Papier. 6 volumes, 3027 pages. 278 sur 195 millimètres. D.

rel. (Saint-Germain, Résidu 333-338.)

 

17744-17747. « Histoire de la Constitution de N. S. P. le pape Clément XI,

donnée le 8 septembre 1713, et qui commence par ces mots : Unigenitus Dei

filius, » par D. Vincent THUILLIER et D. LESUEUR. Minute jusqu'au livre XVII (1715). -- En tête du dernier volume (17747), qui contient des brouillons, notes, etc., sont quelques lettres adressées à Dom Lesueur. XVIIIe siècle. Papier. 375, 247, 230 et 134 feuillets. D. rel.

(Saint-Germain, Résidu 341-343.)

 

17748. Mélanges sur le Jansénisme.

Copies de « lettres de M. le c[ardinal] de Noailles, depuis 1707, jusqu'à

la fin de 1712 ; » lettres au cardinal de Rohan ; « lettres du cardinal de

La Trémoille au c[ardinal] de Polignac, » etc. Cf. aussi les mss. français 23483-23484. XVIIIe siècle. Papier. 224 feuillets. 280 sur 195 millimètres. D. rel.

(Saint-Germain, Résidu 345.)

 

 

Le parti d’en rire

 
WILLART DE GRECOURT,  Jean-Baptiste Joseph (1693-1743)

 Philotanus, ou l'Histoire de la constitution Unigenitus, poème, 1720

 Les Appellants de l'autre monde, 1731-1732

 Les Nouveaux appellants ; ou la Bibliothèque des damnés. Nouvelles de l'autre monde, 1732

 L'Enfer révolté, ou les Nouveaux appellants de l'autre monde, confondus par Lucifer, 1732

L'Enfer en déroute par la doctrine des jésuites. Nouvelles de l'autre monde, 1733

JOUIN, Nicolas (1684-1757), Le Vrai Recueil des Sarcelles, Mémoires, Notes et Anecdotes intéressantes Sur la conduite de l'archevêque de Paris et de quelques autres Prélats François : Le Philotanus, et le Porte-Feuille du Diable ; Ouvrage absolument nécessaire à ceux qui veulent prendre une juste idée des maux que l'Eglise a soufferts pendant le règne de la ci-devant soi-disant Société de Jesus, A Amsterdam, Aux Depens de la Compagnie, 1764.2 t. in-12 : 472 pp. /330 pp.

Première édition collective de ces pièces satiriques, d'un style parfois plus que grivois, en vers et en patois & qui fut donnée à l'occasion de la suppression de l'ordre des Jésuites, contre leur société et les adhérents à la bulle Unigenitus, par Nicolas Jouin, 1684-1757

 On ne connaît presque rien de la vie de ce contemporain de Voltaire, on sait seulement que, après avoir exercé le commerce de la joaillerie, il s'établit banquier à Paris où il mourut. Il était lié avec l'abbé Grécourt, et pendant près de trente ans il publia des satires et des libelles contre les jésuites et contre les prélats qui voulaient que, dans leurs diocèses, les curés se conforment à la bulle Unigenitus. La foule de petits pamphlets en vers et en prose que l'on doit à ce poète théologien, se fait remarquer par un ton plus que grivois, et en même temps par l'érudition décalée des notes explicatives. La médisance et la calomnie prennent dans sa prose un caractère sérieux, qui contraste avec le ton burlesque de ses vers.

En 1729, l'archevêque de Paris, Vintimille, ayant suspendu de l'exercice de ses fonctions le curé de Sarcelles, du Ruel, qui avait refusé d'accepter la constitution Unigenitus, le parti janséniste prit fait et cause pour cet ecclésiastique. A cette occasion, Jouin composa, sous le nom de Sarcelles, des harangues en vers et en patois, qui étaient censées être adressées par les habitants du village de Sarcelles à de Vintimille. Le succès de ces harangues fit naître un genre littéraire, les Sarcellades à l'instar de Jean-Joseph Vadé et des ses histoires poissardes.

 

Et une multitude de feuilles volantes satiriques sur la bulle Unigenitus, chansons etc… dans les Archives notamment à la bibliothèque de l'Arsenal

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23 mars 2007 5 23 /03 /mars /2007 13:49

· Le musée national des Granges de Port-Royal
78114 Magny-Les-Hameaux. Tél. 01 39 30 72 72. Conservateur : Philippe Luez.
Le musée est installé sur les lieux de la retraite des Solitaires de Port-Royal et des Petites Ecoles de
Port-Royal. Nombreux documents écrits et iconographiques.
Heures d’ouverture : tous les jours sauf le mardi, de 10h à 12h et de 14h à 18h. Visites commentées
sur demande.

· Les ruines de l'abbaye de Port-Royal des Champs
78114 Magny-Les-Hameaux. Tél. 01 30 43 74 93.
Dans la vallée de Chevreuse, les vestiges de l’abbaye, la grange, le colombier de conception originale,sont ouverts à la visite.
Réunifié en un seul domaine avec le musée national des Granges depuis peu

· Hôpital Cochin ex Port-Royal de Paris
123 boulevard de Port-Royal 75014 Paris.
Dans l’enceinte de l’hôpital Cochin subsistent la chapelle, le choeur des religieuses, la salle capitulaire,
le cloître. Une messe est célébrée chaque dimanche à 10h30 dans la chapelle, de septembre à la
Pentecôte

Ecole des Sourds Muets ex séminaire oratorien de Saint-Magloire
rue du Faubourg Saint-Jacques
http://www.paris-pittoresque.com/monuments/30b.htm

http://www.injs-paris.fr/News/patrimoine/Historique_lieux_INJS.pdf
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18 mars 2007 7 18 /03 /mars /2007 10:24
"Discrimen inter Philosophiam ac Theologiam. Illi servit ratio, huic memoria: principium ejus traditio non scripta, per accidens etjam scripta. Quid Christus et Apostolus, in tradenda Theologia spectarint."
Jansenius et Saint-Cyran, Augustinus,  t. II, 1640, p.8, caput quartum

"Dieu, qui par un conseil secret de sagesse éternelle conduit les âmes qui le servent sans leur montrer les fins où il tend, a fait naître en quelques-unes, il y a plusieurs années, le désir de le voir honorer dans l'Eglise par un ordre de religion portant le titre du Saint-Sacrement, et particulièrement destiné à la vénération de cet auguste mystère.
La rencontre heureuse arrivée en même temps de la ruine du parti hérétique en France, qui avait entrepris d'effacer la mémoire d'une si glorieuse merveille de la puissance divine, a fait voir la cause principale de cette institution, qui était auparavant inconnue, qui est d'être un mémorial de la victoire qu'il a plu à Dieu de donner à son Eglise, et tout ensemble une perpétuelle action de grâces de ce bienfait."
Constitutions du monastère de Port-Royal du Saint-Sacrement, chapitre I, De la vénération du Saint-Sacremet

"Si le jansénisme intéresse encore, ce n'est donc pas seulement à cause de la place qu'il a tenue dans la littérature et l'histoire françaises, ni même parce que les Solitaires ont acquis la pureté des morts-qui se prête à tous les cultes- ou la grandeur des martyrs-qui invite à protester: " Je serai du parti qu'affligera le sort". L'intransigeance même avec laquelle ils ont défendu la sainteté de l'Eglise, puis les droits de la conscience n'est encore qu'un signe. Car si l'on considère le jansénisme pour ce qu'il est d'abord, c'est à dire un réformisme chrétien, on y reconnaîtra une fidélité qui s'exprime sur le mode du retrait, qui repose sur l'expérience d'une irréductible originalité et qui, finalement, achève et rend évidente une rupture profonde entre le christianisme et la société ambiante."
Michel de Certeau, "De Saint-Cyran au jansénisme, Le lieu de l'autre, Paris, 2005, p. 232

"De même si la publication des Lettres provinciales marque une date dans l'histoire de la littérature et dans la vie de Port-Royal, ne nous figurons pas que cette année-là le courant de la pensée littéraire et le courant religieux janséniste se sont confondus. Nous savons bien que Pascal n'a pas réconcilié M. de Sacy avec Montaigne, que les jansénistes n'ont pas cessé de condamner la concupiscence de l'esprit, que pour eux Pascal n'était qu'un instrument de Dieu, et qu'ils attachaient peut-être plus d'importance au miracle de la Sainte Épine dont il avait été favorisé dans sa famille qu'à son activité d'écrivain. Lorsque Sainte-Beuve nous trace le portrait de ceux qui sont entrés à Port-Royal, nous saisissons sur le vif le dédoublement de leur personne : ce sont bien les mêmes hommes ; mais sont-ce les mêmes figures, celles dont le monde a gardé le souvenir et celles qui se sont imposées à la mémoire des jansé­nistes, tout le brillant de l'esprit, du talent s'étant éteint, la conversion marquant une fin dans une société et dans l'autre un commencement, comme s'il y avait là deux dates qui n'ont point leur place dans le même temps?"
Maurice Halbwachs, La mémoire collective,1950

http://classiques.uqac.ca/classiques/Halbwachs_maurice/memoire_collective/memoire_collective.html
Voir également du même auteur les cadres sociaux de la mémoire, 1925
http://classiques.uqac.ca/classiques/Halbwachs_maurice/cadres_soc_memoire/cadres_soc_memoire.html


Abrégé de l'histoire de Port-Royal par Jean Racine publié bien après sa mort en 1742:

 http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k894090


Mémoires du XVIIe siècle:
Thomas Du Fossé:
Mémoires de Pierre Thomas, sieur du Fossé, publ. en entier, pour la première fois, avec une introd. et des notes par F. Bouquet, Rouen : Ch. Métérie, 1876-1879, 5 vol. , in-8.
http://
gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k36189w

Histoire du XVIIIe siècle
Dom Charles Clémencet:
Histoire littéraire de Port-Royal
http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k682580


Port-Royal littéraire et spirituel

Sainte-Beuve, Port-Royal :
http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k895752


Abbé Henri Bremond, Histoire littéraire du sentiment religieux en France, t. IV La conquête mystique, l'école de Port-Royal, Paris, Colin, 1967:
http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k7654g

Yves KRUMENACkER,  L’école française de spiritualité, Des mystiques, des fondateurs, des courants et leurs interprètes, Paris, Cerf, 1998.

Dictionnaire de Port-Royal, 2004

http://dossier.univ-st-etienne.fr/icl/www/contenu/annexe_dico.htm


Culte des manuscrits:

http://www.amisdeportroyal.org/portroyal/file/collections.pdf


Saint-Cyran:

Jean Orcibal

  • Jean Orcibal, Jean Duvergier de Hauranne, abbé de Saint-Cyran, et son temps, 1581-1638, Louvain, Bureaux de la Revue, 1947
  • Jean Orcibal, La Spiritualité de Saint-Cyran : avec ses écrits de piété inédits, Paris, Vrin, 1962
  • Jean Orcibal, Saint-Cyran et le jansénisme, Paris, Seuil, 1961


Pascal

Jean Mesnard

  • En plus d’un très grand nombre d’articles et de contributions à des actes de colloques, Jean Mesnard est l’auteur de :

  • Pascal : l'homme et l'œuvre, 1951
  • Œuvres complètes de Pascal, 1964-1992, 4 vol. (7 prévus), édition critique
  • Pascal et les Roannez, 1965, 2 vol.
  • Pensées de Pascal, 1976, édition critique

Petite Bibliographie Port-Royaliste récente:

Ellen Weaver, La Contre-réforme et les constitutions de Port-Royal, Le Cerf, 2002

Bernard Chédozeau, Port-Royal et la Bible. un siècle d'or de la Bible en France 1650-1708, Paris, Nolin, coll. 'Univers Port-Royal, 2007, avec une préface de Philippe Sellier, 512 p.

Philippe Sellier, Port-Royal et la littérature, Honoré Champion, 1999-2001, 2 vol. : I - Pascal; II - Le siècle de Saint-Augustin, La Rochefoucauld, Mme de Lafayette, Racine.

- Dominique Descotes et al. Le Rayonnement de Port-Royal, Honoré Champion, 2001.

William Ritchey-Newton, Sociologie de la communauté de Port-Royal, Klincksiek, 1999.

Jean-François Thomas, Le problème moral à Port-Royal, Nouvelles Editions Latines. -

Jean Lesaulnier, Port-Royal insolite, Klincksieck, 1994.

Louis Cognet, Claude Lancelot, le solitaire de Port-Royal, Flammarion, 2001. -

Du même, La réforme de Port-Royal, Flammarion, 2001.

Perle Bugnion-Secrétan, Mère Agnès (1593-1672), abesse de Port-Royal, d'après ses écrits, Le Cerf, 1996.

Michel Meyer, Port-Royal, PUF (Revue internationale de philosophie n° 190), 1995.

Paule Jansen, Arnauld d'Antilly, défenseur de Port-Royal, Vrin.

Frédéric Delforges, Les petites écoles de Port-Royal, 1637-1660, Paris, Cerf, 1985

( Voir la collection Univers Port-Royal dirigée par Jean Lesaulnier pour les publications et republications récentes)


Le Mythe de Port-Royal aujourd'hui?

Roman:

Lydie Salvayre, La puissance des mouches, Paris, Seuil, 1998

Résumé:

L'homme qui se raconte tout au long de ce livre est un être que rien ne prédisposait à parler de la sorte, à coups de sarcasmes et de citations, d'injures et d'envols lyriques, de phrases grand style et d'autres enragées. Il est vrai qu'il ne s'exprime pas directement devant le monde, mais dans l'espace muré d'une prison. Il est vrai qu'il a tué et que son crime a en quelque sorte délivré sa parole. Il peut désormais évoquer, avec un détachement ironique et cruel, son enfance saccagée ; les liens ambigus qui l'unissaient à sa femme, et son métier de guide au musée de Port-Royal où des touristes en troupeaux venaient distraire leur ennui.

Film:

Fragments sans grâce: un film de Dedieutre, dedieutre....

Une déconstruction qui s'aimerait décoiffante (caricaturalement jésuite ou tout au moins de sensibilité  maniériste voire  maniérée) du mythe de Port-Royal avec pour toile de fonds  :  Paris filmé comme si l'on était à Rome. Pour bruitage: la  circulation de bagnoles  agrémentée de plain chant. Mais y avait-il encore quelche chose à détruire?

FRAGMENTS SUR LA GRACE
- ESSAI - FRANCE - 2006 - 1H41 -
 
  programmation dans le 75005
  semaine Du mercredi 14 mars 2007 au mardi 20 mars 2007
REFLET MEDICIS
3-5-7 RUE CHAMPOLLION 75005 PARIS - METRO SAINT MICHEL
Tel: 08.92.68.48.24
- Horaires: JEU LUN 11H30
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15 mars 2007 4 15 /03 /mars /2007 14:34

Jansénisme et Inquisition

(résumé de la conférence du 13 mars 2007)

 

« L’Inquisition et la Société [[de Jésus], les deux fléaux de la vérité » note Pascal dans ses Pensées (Brunschvicg 920). Les jansénistes abominent l’Inquisition, ce trait en témoigne. Néanmoins, il est possible de soutenir que « Jansénisme » et « Inquisition romaine » forment un couple modèle à de nombreux égards.

Les néologismes de « janséniste » (1643), pour désigner un partisan de Cornelius Jansen, dit Jansénius, docteur en théologie à la faculté de Louvain, et de « jansénisme » (1649), n’apparaissent qu’à la suite des condamnations romaines de l’Augustinus de Jansenius et au cours de la polémique qu’elles engendrent en France. Indirectement, avec le relai des libelles jésuites, ils ont été ainsi en quelque sorte générés par l’Inquisition.

L’Inquisition romaine a accordé un traitement de faveur au jansénisme. Selon une procédure exceptionnelle à l’origine qui va devenir ordinaire à partir de 1651, l’examen des propositions suspectées d’hérésie est de moins en moins confié au personnel habituel et complet du Saint-Office, et de plus en plus aux membres, peu nombreux et institutionnellement choisis, d’une commission particulière, extraordinaire ou générale,  une congrégation de l’Inquisition instituée spécialement, comme cela avait été le cas au moment des affaires de Auxiliis gratiae.

La longévité de l’association est remarquable : elle court du concile de Trente, pour les prémisses à la Révolution française pour le dénouement, de la condamnation de Baïus en 1567  par Pie V à la bulle Auctorem Fidei, contre les actes du concile de Pistoie, en1794.

La fertilité des relations est considérable. Pour la seconde moitié du XVIIe siècle et la première moitié du XVIIIe siècle, les livres jansénistes (particulièrement d’auteurs français) représentent un pourcentage  significatif de l’ensemble des ouvrages mis à l’Index à la même époque : autour de 10% de 1641 à 1712 puis autour de 30% de 1713 à 1750. A partir de la seconde moitié du siècle des Lumières, ils diminuent sensiblement mais leur provenance s’élargit à d’autres pays que la Belgique ou la France : l’Italie au premier chef mais également l’Espagne, le Portugal, l’Autriche et  l’Allemagne.   

Comme beaucoup de couples passionnels, les disputes sont tout aussi exemplaires. Elles permettent d’illustrer toutes les modalités, difficultés et subtilités auxquelles se heurtent, à l’époque moderne, la définition de l’hérésie et le jugement d’un texte dont le statut se situe à mi chemin entre la théologie, la polémique et l’histoire, en l’occurrence l’Augustinus, publié pour la première fois à Louvain en 1641. En réalité, ces trois in-folio sont une réponse augustinienne tardive aux questions sur la grâce soulevées lors des précédentes controverses de Auxiliis gratiae. Controverses qui avaient divisé les dominicains espagnols et les jésuites et que le pape à l’issue des nombreuses congrégations chargées d’examiner le différend, n’avait pas voulu trancher autrement qu’en imposant le silence aux deux ordres en 1625. Sans doute, la mort de Jansenius, survenue le 6 mai 1638---l’auteur ne put ainsi  jamais s’expliquer ou se rétracter, selon la procédure normale--- n’est-elle pas étrangère à la démultiplication de problèmes de sens qui a caractérisé le nouveau différend : sens des propositions, sens du livre, sens de l’auteur, authenticité matérielle et formelle (proposition par rapport au livre et réciproquement), authenticité nominale (livre par rapport à l’auteur), authenticité doctrinale (auteur par rapport à la tradition augustinienne et du dogme) comme l’a détaillé Bruno Neveu.

Enfin, divorce oblige, l’évolution des disputes s’est soldée, dans la durée, par un renforcement et une clarification des positions qui étaient restées floues et empiriques au XVIIe siècle : du côté de l’Inquisition, l’autorité affirme sa nature infaillible et son étendue universelle sous la souveraineté du pape, du côté des jansénistes, la résistance rejette précisément cette autorité et se confond de plus en plus avec les forces anticurialistes.

La longue chaine des condamnations élaborées par l’Inquisition romaine permet de suivre les tribulations du sens en lequel doit être entendue « l’hérésie » janséniste. Son fil conducteur, comme l’ont montré Bruno  Neveu, Lucien Ceyssens ou Jean Orcibal, est le point de l’obéissance d aux décrets de l’autorité inquisitoriale et non une définition théologique et canonique de l’hérésie dans la rigueur du terme (opiniâtreté à défendre une proposition en contradiction avec la vérité révélée).

La scène originelle de la rencontre entre l’Inquisition romaine et le jansénisme pendant la séquence 1641-1643  est fondamentale, car elle détermine en grande partie l’engrenage de la suite des procédures. Elle ne se situe pas sur le terrain dogmatique,  là est le point essentiel à souligner. Les bulles et brefs d’Urbain VIII  ne font, en effet, que répéter les décisions pontificales de 1607-1625 interdisant de traiter des questions de Auxiliis gratiae. La confrontation n’est même pas véritablement première, en réalité,  puisque la  bulle In eminenti s’appuie également sur les précédentes condamnations de Michel Baïus, défenseur de la toute-puissance de Dieu et doyen de l’université de Louvain,  par Pie V, en 1567, et  par Clément XIII, en 1579. Ces dernières avaient pour particularité d’être demeurées abstraites, sans référence à des ouvrages précis, ni même au vénérable auteur qui avait assisté aux dernières sessions du Concile de Trente et  qui avait fini, du reste, par se rétracter.

La polémique s’est enflammée autour de l’Augustinus dès la sortie des premiers feuillets d’épreuves et a poussé le pape Urbain VIII à faire examiner l’ouvrage de feu l’évêque d’Ypres, accusé par les jésuites, notamment dans leurs thèses du 22 mars 1641, d’être un hérétique plus dangereux que Luther et Calvin réunis. Pour mettre fin à l’agitation, le Saint-Office fait paraître, le 1er août 1641,  un décret prohibant l’Augustinus et tous les ouvrages écrits aussi bien pour le combattre que pour le défendre, au double motif de contravention aux décrets de Paul V et d’Urbain VIII  interdisant les disputes sur la grâce et de « scandale public ».

L’inefficacité du nouveau décret, notamment face à la résistance des Conseils de Bruxelles qui empêchent son application, impose l’idée de la nécessité d’une bulle dogmatique au sein des membres du Saint-Office, surtout sous l’impulsion de l’assesseur Francesco Albizzi, juriste  lié à la Société de Jésus et au Collège romain. L’examen des théologiens aboutit à la condamnation de l’Augustinus, in globo, en tant qu’il contient et renouvelle plusieurs erreurs de Baïus déjà condamnées, sans aucune précision sur le fond ni aucun critère dogmatique. Publiée officiellement à Rome le 19 juin 1643, la bulle In eminenti reprend, dans son premier paragraphe, le texte de la constitution promulguée par Pie V, en 1567, contre 79 propositions, sans mention explicite de Baïus ou de ses œuvres. Elle résume également sa confirmation par Grégoire XIII, rappelle les décrets de Paul V et Urbain VIII qui portent défense de traiter « des secours de la grâce », renouvelle le décret du 1 août 1641 et prohibe enfin plusieurs ouvrages issus de la polémique renaissante.

A partir de 1643, peu après la publication de la Fréquente Communion d’Antoine Arnauld, disciple de l’abbé de Saint-Cyran, lui-même ami de Jansenius, la querelle se transfère en France. Celle-ci va se révéler une terre d’accueil particulièrement fertile, d’où il va résulter une intensification des rapports entre le jansénisme et l’Inquisition romaine. A la suite de vifs débats entre docteurs jansénistes et  docteurs antijansénistes au sein de la Faculté de théologie de Paris, vers 1649, à  propos de propositions formulées d’après l’Augustinus, cinq d’entre elles, choisies par le syndic Nicolas Cornet, prises abstraitement et sans référence à l’ auteur, sont transmises pour examen à l’assesseur Albizzi à Rome. La bulle Cum occasionne d’Innocent X les condamnera toutes le 31 mai 1653. Cependant, elle ne les articule à l’œuvre de Jansénius que par le lien très lâche de l’incipit de la bulle : « Cum occasione libri Cornelii Jansenii ». La commission du Saint-Office constituée par Albizzi en avril 1651 a élaboré une constitution qui se présente comme dogmatique, qui suggère même discrètement l’infaillibilité du document mais qui reste parfaitement vide sur le fond. Ainsi que l’a montré définitivement Toon Quaghebeur, sur la base des différentes versions du texte, « nulle part la bulle ne dit que les cinq propositions, se trouvent dans le livre de Jansénius, nulle part la bulle n’affirme que les cinq propositions sont de Jansenius, nulle part la bulle ne confirme que les opiniones libri Janseniii sont condamnées. » Innocent X accompagne la bulle d’un bref à Louis XIV et d’un autre aux évêques de France, qui prescriront la signature d’un formulaire à tout le clergé, obligeant de condamner de cœur et de bouche la « doctrine » des cinq propositions.

Le sens dans lequel sont condamnées les cinq propositions reste ainsi parfaitement énigmatique. Ce sera la source de la fameuse controverse de plus d’un demi siècle contre laquelle l’Inquisition romaine choisit de réagir par la force, en réaffirmant  la compétence du juge et en réclamant l’exécution de la sentence. Devant la résistance des jansénistes qui refusent d’attribuer les propositions à Jansenius, Alexandre VII, dans la bulle Ad sacram beati Petri sedemAugustinus et qu’elles ont été condamnées dans le sens auquel cet auteur les a expliquées. » Mais elle en reste, pour ce qui est de la définition de leur caractère litigieux, à la constitution de son prédécesseur Innocent X, ce qui revient à éluder, une fois encore le problème du contenu dogmatique. du 16 octobre 1656, déclare que « les cinq propositions ont été tirées du livre du même Cornelius Jansenius, évêque d’Ypres, intitulé

Cette nouvelle constitution dogmatiquement vide marque la naissance de « l’hérésie jansénienne », selon l’expression qu’emploie Alexandre VII dans son Bref aux évêques en 1663. Elle entraine également des conséquences pratiques : la nécessité d’ôter « tous les subterfuges et les prétextes de désobéissance ». Elle conduit à exiger du clergé, tant séculier que régulier, religieuses comprises,   par la signature d’un Formulaire pontifical. Ce dernier prévoit une condamnation « sincère » des cinq propositions « dans le sens de l’auteur ».  Le serment exigé se rapporte ainsi avant tout à des données intérieures soustraites à une appréciation objective. Il provoque une telle résistance, que Louis XIV qui l’avait pourtant attendu avec impatience,  finit par demander son abandon à Clément IX en 1668.

La paix de l’Église ne parviendra à se rétablir en 1669 que par le retour tacite à la distinction entre le « fait » (provenance et auteur) et le « droit » (sens selon l’auteur). Les jansénistes garderont un silence respectueux sur le « fait » ainsi distingué du « droit » puisqu’ils défendent la thèse que les cinq propositions ne se trouvent pas dans l’Augustinus. Mais le calme ne dure guère, notamment en raison des développements de la querelle sur la morale pratique, le rigorisme et  le laxisme, à Louvain.  Ces disputes, aggravées au tournant du siècle, par une sourde bataille d’historiens autour de la mémoire des luttes religieuses du Grand Siècle,  débouchent en  France sur la crise du « cas de conscience ». Celle-ci est déclenchée par le problème concret de la conduite à tenir face à un pénitent à l’attitude janséniste caractérisée, question qui est soumise aux théologiens de la Faculté de théologie de Paris puis déférée au Saint-Office. Finalement, c’est le principe même du « silence respectueux » qui va être rejeté par la bulle Vineam Domini en 1705, mais sans que soit précisé si l’assentiment concerne le « droit » seulement ou le « droit » et le « fait ». Seule la soumission personnelle au Formulaire est exigée au nom des précédentes constitutions apostoliques et au nom des « loix de l’Église et de l’État » ainsi que Clément XI l’a stipulé à Louis XIV dans son Bref de février 1703. La revendication par les jansénistes du maintien de la distinction va les transformer, aux yeux des théologiens de l’Inquisition, en une variété de rebelles spécialement dangereuse, parce que insaisissable. Ils sont capables, en effet, de s’expliquer « dans les propres termes de ce Formulaire, comme fait l’Église, sans penser néanmoins comme elle pense ; et faisant profession de se soumettre aux constitutions apostoliques, en même temps qu’ils les contredisent dans le fond de leur cœur ».

Face à autant d’ambigüités, les contestations, loin de s’apaiser, ne pouvaient que s’enflammer davantage. Au cours de la polémique, l’oratorien Pasquier Quesnel, dont plusieurs ouvrages ont déjà été mis à l’Index,  devient le successeur tout désigné du grand Arnauld à la tête du parti et cela avec d’autant plus d’évidence qu’il a rejoint son maître dans son exil à Utrecht et qu’il s’est illustré dans la défense de sa mémoire. Ses Réflexions Morales sur le Nouveau Testament en français dont il a entrepris l’édition dès 1678 sont dénoncés par deux fois au Saint-Office, en 1692-1693 et en 1699. L’ouvrage est condamné par un bref le 13 juillet 1708, mais Louis XIV fait pression pour avoir une constitution claire et définitive contre le livre dont il redoute visiblement qu’il ravive la sécession janséniste. Le 1er février 1712, le cardinal Fabroni institue une nouvelle commission spéciale (8 théologiens et 5 cardinaux) pour examiner 155 propositions. Jusqu’en décembre, les théologiens se réunissent 22 fois au couvent de la Minerve, siège ordinaire du Saint-Office. Il s’ensuit encore 23 sessions cardinalices où le pape prend une part prépondérante, devant une assistance composée de tout le personnel de l’Inquisition romaine. Par ses directives rédigées au nom des évêques de France, le père jésuite Daubenton semble avoir exercer une certaine influence sur la rédaction de la bulle Unigenitus. Finalement, le 8 septembre 1713, condamnation est prononcée contre 101 propositions. Elles sont donnée en latin, sans référence aucune et plus étonnant encore, sans la censure relative à chacune. Si la première partie dogmatique concernant les questions de la grâce et de la prédestination reste importante : (I-XLIV), trois nouveaux thèmes sont apparus, la morale : (XLV-LXXI), la pratique religieuse (LXXII-LXXXIX) et enfin la discipline ecclésiastique (XC-CI). La bulle Unigenitus va jusqu’à déclarer l’hérésie « formelle » mais se contente d’une censure globale : « Nous…réprouvons toutes et chacune les propositions ci-dessus rapportées comme étant respectivement : fausses, captieuses, mal sonnantes, capables de blesser les oreilles pieuses, scandaleuses, pernicieuses, téméraires, injurieuses à l’Église et à usages, outrageuses, non seulement pour elle-même mais pour les puissances séculières, séditieuses, impies blasphématoires, suspectes d’hérésies, sentant l’hérésie, favorables aux hérétiques, aux hérésies et au schisme, erronées, approchantes de l’hérésie et souvent condamnées, enfin comme hérétiques et comme renouvelant diverses hérésies, principalement celles qui sont contenues dans les fameuses propositions de Jansenius, prises dans le sens auquel elles ont été condamnées. » Fait nouveau, les paragraphes introductifs diabolisent tout à la fois l’auteur qualifié notamment de « faux prophète », ou de « séducteur plein d’artifices » et le livre, auquel est attribué un venin « très caché » sous couvert de l’autorité de la parole de Dieu. La difficulté de débusquer l’hérésie janséniste derrière des apparences de piété parfaitement orthodoxe est expliquée tautologiquement par sa « doctrine artificieuse ». Une forme aimable cache un fond secrètement pernicieux : « le style de cet ouvrage est plus doux et plus coulant que l’huile, mais ses expressions sont comme des traits prêts à partir d’un arc qui n’est tendu que pour blesser imperceptiblement ceux qui ont le cœur droit ». Tout se passe en quelque sorte comme si c’était la prise de conscience de la difficulté herméneutique qu’il fallait nier en la rejetant du côté de l’hérésie. De nombreuses propositions données sans commentaire paraissent en effet de pures citations des Écritures, de la liturgie, des Pères, en particulier de saint Augustin. Les dernières concernent des points de discipline essentielle des libertés de l’Église gallicane qui n’avaient jamais été prohibés par une constitution jusque là.

La première mesure de résistance des jansénistes va être de traduire, de commenter et de diffuser massivement la bulle Unigenitus afin d’en appeler au jugement du public, notamment dans l’écrit intitulé les Hexaples qui fait référence à l’Écrit à trois colonnes publié lors de la précédente affaire des cinq propositions. A une échelle plus modeste, cette stratégie d’appel au tribunal du public avait déjà été utilisée au XVIIe siècle, notamment au moyen du Journal de Monsieur de Saint-Amour entièrement consacré aux tractations romaines autour de la bulle Cum occasione.

Le refus de l’Inquisition de donner des explications sur la bulle Unigenitus, pourtant demandées par l’Assemblée du clergé de France, va provoquer la plus formidable crise jamais provoquée par la réception et  l’application d’une constitution romaine, suscitant une foule d’écrits polémiques qui seront à leur tour mis à l’Index, surtout dans la première moitié du XVIIIe siècle mais également au-delà, en langue italienne principalement. [Parmi les livres condamnés tardivement, il faut mentionner le livre de l’abbé François Philippe Mésenguy, Exposition de la doctrine chrétienne paru en 1744 et  mis à l’Index en 1755. La traduction italienne fera encore l’objet d’une congrégation générale le 28 mai 1761. Après moult délibérations, les cardinaux inquisiteurs généraux condamneront et réprimeront l’ouvrage comme contenant des propositions respectivement « fausses, captieuses, malsonnantes, scandaleuses, dangereuses, suspectes, téméraires, contraires aux décrets apostoliques et à la pratique de l’Église, et semblables à des propositions déjà condamnées et prescrites par l’Église » mais, chose remarquable, sans évoquer l’hérésie janséniste. C’est le parti janséniste qui se chargera de rendre publique cette procédure par un  Mémoire justificatif en 1763 soumettant au jugement du public, selon la démarche devenue habituelle,  les 45 propositions distribuées aux consulteurs,  et allant jusqu’à se permettre des observations sur le bref du pape. Sans doute faudrait-il mettre ce cas en rapport avec la censure soigneusement préparée par le Saint-Office mais jamais promulguée du bréviaire parisien de 1736, rédigé par Mésenguy, Vigier et Coffin et accusé de favoriser les erreurs de Baïus, Jansenius et Quesnel. L’ironie de l’histoire veut que Mgr de Vintimille qui avait commandité le bréviaire soit connu pour son action antijanséniste dans le diocèse de Paris ! Sans doute également le pontificat de Benoit XIV est-il marqué par une attitude de prudente libéralité à l’égard de ce qu’il appelle « les différentes opinions » des écoles---les thomistes, les augustiniens et les molinistes, trois manières d’accorder la liberté de l’homme avec la toute-puissance de Dieu. Cette politique le conduit en 1748 à « interpeller et admonester » publiquement le grand inquisiteur d’Espagne à propos de la mise à l’Index, l’année précédente, de deux ouvrages anciens du cardinal Noris, de l’ordre des Hermites de saint Augustin, pourtant lavé du soupçon de baianisme et de jansénisme puisqu’il avait été placé par Innocent XII au suprême Tribunal de l’Inquisition romaine. La querelle janséniste finit par atteindre le cœur même de l’Inquisition et à y introduire le venin de tensions.]

La bulle Auctorem fidei contre les actes du synode de Pistoie réuni par l’évêque Scipione Ricci en septembre 1786, bulle signée par le pape Pie VI le 28 août 1794, jour de la saint Augustin, est généralement considérée comme le dernier acte sur lequel se clôt la querelle janséniste. S’il est vrai que le synode a ravivé un point essentiel de l’imbroglio janséniste en réaffirmant le bienfondé du silence respectueux et de la distinction du « fait » et du « droit », la bulle s’attache beaucoup plus aux questions ecclésiologiques et juridictionnalistes. Elle les mêle aux erreurs dogmatiques classiquement condamnées chez Baïus, Jansénius et Quesnel, mais également, il faut le noter, aux hérésies protestantes. Attribuée pour l’essentiel au cardinal Gerdil, considéré pourtant comme un modéré,  c’est la constitution antijanséniste la plus précise et la plus tranchante-les censures étant portées sur chacune des propositions et non plus in globo. Mais elle assimile désormais le jansénisme aux forces réformistes anticurialistes. L’hérésie vide de contenu s’est remplie d’une autre hérésie riche de sous-entendus historiques en 1794. Comme les Nouvelles ecclésiastiques du 28 janvier 1796 le soulignent pour s’en moquer, cette censure cardinalice a duré trois ans et demi. Il a fallu en effet le lent travail de trois congrégations particulières, entre février 1789 et mai 1793, pour aboutir au texte final des 85 articles concernant l’autorité et la  constitution de l’Église (1-15), la théologie dogmatique (16-26), la sacramentaire (27-60), la pastorale (61-79), la réforme des ordres religieux (80-85), la convocation d’un synode national (85). La seconde s’est déroulée en même temps que la congrégation particulière pour les affaires de France formée pour juger des réponses à fournir à la cour de France, au sujet de la Constitution civile du clergé. Ainsi, le synode de Pistoie est jugé, en amont, à l’aune des condamnations de l’hérésie janséniste et, en aval, en fonction de l’actualité des réformes ecclésiastiques de la Constituante. Si l’on admet que le texte de la bulle progresse selon un crescendo qui va de la première proposition, typiquement janséniste, sur « l’obscurcissement de la vérité dans l’Église », à la condamnation dans la conclusion des actes de l’Assemblée gallicane de 1682, c’est la menace réelle de la modernité politique, celle de la subordination de l’Église à l’État dont la déclaration de 1682 était la préfiguration, qui est devenue prioritaire aux yeux des cardinaux inquisiteurs. L’acceptation des principes gallicans de 1682 par le concile de Pistoie n’est certes pas qualifiée d’hérésie, mais elle est réprouvée et condamnée comme « téméraire » et « scandaleuse », et, plus précisément encore, comme « souverainement injurieuse » pour le Siège apostolique. Le problème aigu ne porte plus tant sur les matières de la foi que sur la place de l’Église au regard de l’autorité politique. Au couple « Jansénisme » et « Inquisition » va se substituer au XIXe siècle celui de « Gallicanisme » et  « Ultramontanisme ».

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13 mars 2007 2 13 /03 /mars /2007 17:35
APPEL À CANDIDATURES

COLLOQUE PORT-ROYAL ET LA TRADITION CHRÉTIENNE ORIENTALE


Dans l’esprit des colloques consacrés à Port-Royal et les Protestants et
Port-Royal et le peuple d’Israël (Chroniques de Port-Royal, n° 47-1998 et
53-2004), la Société des Amis de Port-Royal, avec le soutien de l’IRCL,
Institut de Recherches sur l’âge classique et les Lumières (UMR 5186 du
CNRS), prévoit d’organiser, dans la seconde quinzaine de septembre 2008 et
à Montpellier, un colloque provisoirement intitulé

PORT-ROYAL ET LA TRADITION CHRÉTIENNE ORIENTALE

Le mouvement de Port-Royal a en effet favorisé le retour aux sources
patristiques et le respect de la Tradition chers aux Eglises d’Orient. Les
Messieurs se sont intéressés aux Pères grecs alors souvent méconnus, et
ils ont su les concilier avec leur vénération pour S. Augustin. Se
laissent deviner des analyses proches, autant que d’importantes
différences que ce colloque voudrait explorer.

Les sujets suivants pourraient être abordés :

1. Le concept de Tradition à Port-Royal et dans les Eglises orientales du
XVIIe siècle
- Tradition écrite et non écrite.

2. La patristique et le rapport aux Pères
- L’enseignement du grec à Port-Royal.
- Traductions, éditions, études port-royalistes d’auteurs comme les Pères
du désert, S. Clément d’Alexandrie, S. Athanase, S. Chrysostome, S. Jean
Climaque, par exemple.

3. Questions de doctrine
a. Théologie de la grâce :
- Situation de S. Augustin dans l’Orthodoxie et à Port-Royal.
- Le péché originel dans l’Orthodoxie et à Port-Royal.
- Pascal et les théologiens orthodoxes.
b. Théologie des sacrements
- L’Eucharistie :
- Théologie de l’Eucharistie à Port-Royal et dans l’Orthodoxie.
- Contacts entre Port-Royal et l’Orient pour la défense de l’Eucharistie.
- La liturgie et les traductions liturgiques.
- La pénitence (confession auriculaire)
c. La Vierge Marie dans l’Orthodoxie et à Port-Royal.

4. La prière et l’oraison dans l’Orthodoxie et à Port-Royal.
- L’hésychasme et la prière perpétuelle ; la prière de Jésus.

5. En discipline :
- Ecclésiologie : le rôle de l’évêque ; la conciliarité ; le ministère
pétrinien.
- Le monachisme : moines d’Orient et solitaires de Port-Royal (érémitisme
et cénobitisme).
- Le conseiller spirituel ; Saint-Cyran et la figure du starets.
- Clerc et laïc dans l’Orthodoxie et à Port-Royal.
- Anglicanisme, gallicanisme, jansénisme et orthodoxie au début du XVIIIe
siècle (les jansénistes ont-ils connu des théologiens orthodoxes ?)

6. L’image à Port-Royal et l’icône au XVIIe siècle
- Les interprétations de la définition de l’image par Nicée 2 : dans
l’icône, et à Port-Royal dans l’interprétation tridentine.
- Les évolutions de l’icône aux XVIIe et XVIIIe siècles.

D’autres suggestions seront les bienvenues.

Ceux qu’intéressent ces questions sont invités à proposer
le titre de leur éventuelle communication, avec un bref résumé en dix lignes,
avant le 30 septembre 2007,
à Christian Belin (christian_belin@hotmail.com)
ou à Bernard Chédozeau (chedozeau.b@wanadoo.fr).


Projet d'union avec l'église russe par les organisateurs
de la lutte contre la bulle Unigenitus

Paradoxalement, ce fut un gallican "appelant " de la "Bulle Unigenitus "
contre Rome, qui s’entremit pour faire entrer l’Eglise russe dans le giron
de l’Eglise catholique romaine. Connaissant très mal le russe, Jubé
fréquente surtout la haute noblesse francophone et des diplomates, comme
le duc de Liria, ambassadeur d’Espagne. Il a ses entrées aussi au
Saint-Synode. Mais la mort de Pierre II et l’accession au trône d’Anna
Ivanovna mettent à l’écart les partisans de l’union et renforcent le clan
allemand et luthérien qui dirige réellement la Russie. Jubé n’a rien vu
des "Vieux Croyants", une sorte de jansénisme de l’orthodoxie, et il a
souvent mal interprété les rites et les doctrines de l’église russe dans
sa volonté de trouver des points de convergence avec le catholicisme et
l’église primitive (dont son jansénisme s’inspirait largement). La
question cruciale de la Trinité et du " filioque " qui avait, lors du
séjour de Pierre le Grand à Paris en 1717, empêché tout accord avec les
docteurs de Sorbonne ne pouvait être réglé par cet ambassadeur officieux,
représentant d’une fraction condamnée de l’Eglise catholique. La relation
de Jubé consacre une partie seulement de son récit aux questions
religieuses. Dans sa forme assez déstructurée, ce récit reste néanmoins,
par les détails qu’il fournit sur la vie russe de cette époque, une
ébauche de ce que Chappe d’Auteroche développera quelques décennies plus
tard : une petite encyclopédie d’une Europe très mystérieuse et encore mal
jugée.

Bibliographie.
Jacques Jubé, "La Religion, les mœurs et les usages des Moscovites", texte
présenté et annoté par Michel Mervaud, Oxford, The Voltaire
Foundation,1992, X-252 p. (SVEC 294).


"Nouvelles ecclésiastiques", 23 octobre 1746, p. 169-172 (nécrologie de
Jacques Jubé).

(abbé Laurent-François Boursier), "Histoire et analyse du livre 'De
l'action de Dieu' ", s.l., 1753, t. III, p. 277-528. Ouvrage posthume
publié par l'abbé Christophe Coudrette. Utilise le récit de voyage en
Russie de Jubé, alors inédit (cf. infra: "La Religion, les mœurs et les
usages des Moscovites").

"Réflexions sur la nouvelle liturgie d'Asnières", (Rouen), 1724. Pamphlet
anonymre contre Jubé.

P. Paul Pierling, "La Russie et le Saint-Siège", Paris, 1907, t. IV, p.
306-387. Point de vue d'un jésuite sur un janséniste.

Edmond Préclin, "Les Jansénistes au XVIIIe siècle", Paris, 1929, p. 180-185.

René Taveneaux, "La Vie quotidienne des jansénistes", Paris, 1985, p.
129-131.

Andreï Chichkine et Boris Ouspenski, "L'influence du jansénisme en Russie
au XVIIIe siècle", "Cahiers du monde russe et soviétique", 29, 1988, p.
339-341.
, "Trediakovski et les jansénistes" (en russe), "Simvol", Meudon, 1990, p.
105-262.

Jacques Jubé, "La Religion, les mœurs et usages des Moscovites", texte
présenté et annoté par Michel Mervaud, "Studies on Voltaire and the
Eighteenth Century", 294, Oxford, 1992, Introduction (p. 1-78), notes,
bibliographie, index.

Michel Mervaud, "Jacques Jubé et l'Union des Eglises", "Revue des études
slaves", Paris, LXX/2, 1998, p.377-398.
, "La Russie de Jacques Jubé", dans "L'Ours et le coq. Essais en l'honneur
de Jacques Cadot", Paris, Presses de la Sorbonne-Nouvelle, 2000, p. 11-28.
, "A propos de Jacques Jubé et du jansénisme en Russie. Recherches
récentes et zones d'ombre" ,"Revue des études
slaves" 2001.



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12 mars 2007 1 12 /03 /mars /2007 08:21
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http://www.cvm.qc.ca/gconti/905/BABEL/Index%20Librorum%20Prohibitorum-1948.htm
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4 mars 2007 7 04 /03 /mars /2007 16:29
Car il ne fit pas remonter comme il devait, le ruisseau, qui lui paraissait si agréable, vers la source d'où il était sorti; mais il se détacha de son auteur; il voulut n'être plus qu'à soi; et se gouverner par sa propre autorité, au lieu de recevoir la loi de celui qui, la lui devait donner.
Il se perdit de cette sorte, en voulant s'élever contre l'ordre de la nature et de la raison, n'y ayant point d'élèvement plus extravagant et plus injuste, que de quitter le principe auquel on doit demeurer inséparablement attaché, pour se rendre comme le principe de soi-même, la règle de sa vie, l'origine de ses connaissances, et la source de sa félicité.
Et qu'est ce que l'orgueil, sinon le désir de cette injuste grandeur: et d'où vient ce désir sinon de l'amour que l'homme se porte? Et à quoi se termine cet amour, sinon à quitter ce bien souverain et immuable, que l'on doit aimer plus que soi-même.

d'après la traduction en français établie par Robert Arnauld d'Andilly et éditée en 1642
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27 février 2007 2 27 /02 /février /2007 13:03
La Lane, Noël de (1618-1673),  Distinction abrégée des cinq propositions qui regardent la matière de la grâce, laquelle a esté présentée en latin à S. S. par les théologiens qui sont à Rome, pour la deffense de la doctrine de saint Augustin, où l'on voit clairement en trois colonnes les divers sens que ces propositions peuvent recevoir, et les sentimens des calvinistes et des luthériens, des pélagiens et des molinistes, de saint Augustin et de ses disciples. [Signé : Noël de Lalane, Toussaint Des Mares, Louis de Saint-Amour, Nicolas Manessier, Louis Angran. 19 mai 1653.], (S. l.,), 1653,  In-4 ̊ , 11 p. (dit l'écrit à trois colonnes)

La première : quelques commandements de Dieu sont impossibles aux hommes justes, lors même qu’ils veulent et s’efforcent de les accomplir, selon les forces qu’ils ont présentes ; et la grâce leur manque par laquelle ils soient rendus possibles.

La seconde : Dans l’état de la nature corrompue, on ne résiste jamais à la grâce intérieure.

La troisième : Pour mériter et démériter dans l’état de la nature corrompue, la liberté qui exclut la nécessité, n’est pas requise en l’homme, mais suffit la liberté qui exclut la contrainte.

La quatrième : Les Semi pélagiens admettaient la nécessité de la grâce intérieure prévenante pour chaque acte en particulier, même pour le commencement de la foi : et ils étaient hérétiques en ce qu’ils voulaient que cette grâce fût telle, que la volonté humaine pût lui résister, ou lui obéir.

La cinquième: C’est Semi pélagianisme de dire que Jésus Christ est mort, ou qu’il a répandu son sang généralement pour tous les hommes .


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22 février 2007 4 22 /02 /février /2007 11:22



La question qui m’a été confiée est loin d’être nouvelle, c’est pourquoi il importe de situer son émergence avec précision . Le rôle des querelles religieuses de l’Ancien régime dans la genèse de la Révolution française a été incriminé d’emblée. La question prend naissance pendant l’événement révolutionnaire lui-même qui voit se forger les deux interprétations promises à se combattre durant le XIXème siècle. Première thèse, le jansénisme, continuateur de l’hérésie protestante, responsable de la Constitution civile du clergé et plus profondément de la déchristianisation. C’est la thèse d’une brochure qui parait au lendemain de l’adoption de la Constitution civile du clergé, Découverte importante sur le vrai système de la Constitution civile du clergé peut-être du jésuite Augustin Barruel, futur auteur des Mémoires pour servir à l’histoire du jacobinisme . Cette interprétation va trouver son terreau de prédilection au XIXe siècle chez les penseurs contre révolutionnaires et les catholiques intransigeants, Joseph de Maistre, Félicité de Lamennais ou dom Guéranger . Plus récemment, en 1929, Edmond Préclin, professeur à la Sorbonne a tenté d’étayer scientifiquement cette piste dans son grand ouvrage : Les jansénistes du XVIIIe siècle et la Constitution civile du clergé .
Seconde interprétation, le jansénisme, précurseur de la bonne Révolution, matrice du républicanisme et de la liberté de conscience. Du côté des partisans de la Révolution, c’est au lendemain du Concordat qui marque la fin des espoirs de l’Église constitutionnelle que l’abbé Grégoire fabrique le mythe républicain de Port-Royal dans les Ruines de Port-Royal , petite brochure parue la première fois en 1801 puis augmentée en 1809, mythe promis, lui aussi à une grande fortune de Michelet à Jaurès, en passant par Louis Blanc et surtout Félix Rocquain, membre de l’Académie des sciences morales et politiques qui, en 1878, dans l’ambiance de la lutte de la République contre l’ordre moral donne la forme la plus achevée de cette interprétation dans son livre : L’Esprit révolutionnaire avant la Révolution . Il met en avant le rôle de l’importance de la querelle janséniste au XVIIIe siècle, dans la montée de l’esprit révolutionnaire et dans la formation de l’opinion publique : « Dès lors, deux partis se formèrent, dans l’un étaient les jésuites et le haut clergé, dans l’autre toute la nation » . Non point que le public entendit grand-chose aux doctrines jansénistes mais on tenait la bulle Unigenitus promulguée contre eux en 1713 pour un symbole, l’emblème de la domination cléricale qui ralliait l’opposition des jansénistes, des gallicans, de tous les ennemis de Rome et de tous les mécontents.
Ce bref préambule historiographique n’avait d’autre objectif que de rappeler la précocité avec laquelle la responsabilité directe ou indirecte des conflits liés au jansénisme a été invoquée, tant chez les amis que chez les ennemis de la Révolution.
Mais qu’est-ce donc au juste que ce « jansénisme » qui est ainsi placé au centre de notre question dès la Révolution française ? Il faut prendre très au sérieux la polémique qui accompagne l’émergence du néologisme. L’invention de « janséniste » vers 1643 , puis de « jansénisme » vers 1649 , exactement contemporain du néologisme de « puritanisme », après la victoire des puritains anglais et au moment de la Fronde, procède de l’effort des jésuites pour identifier, qualifier ou dénoncer les partisans de Jansenius, théologien de Louvain, auteur de l’Augustinus paru en 1640 . Du côté des jésuites, il s’agit de démontrer que Jansenius et ses partisans renouvellent les erreurs de Calvin , tandis que les dits « jansénistes » s’acharnent à prouver leur parfaite fidélité à la doctrine de saint Augustin et à l’esprit du concile de Trente. Ils dénoncent le qualificatif de « jansénisme » comme un fantôme, une chimère .
L’Augustinus, gros in folio en latin sur le problème de la grâce selon saint Augustin doit être considéré comme l’aboutissement tardif des précédentes controverses de Auxiliis gratiae qui avaient opposé les dominicains espagnols aux jésuites à la fin du XVIe siècle, conflit que le pape n’avait pas voulu trancher. Publié après la mort de l’auteur, le livre va être très bien reçu en France mais susciter plusieurs censures romaines ainsi qu’une très curieuse querelle, extrêmement formaliste, qui va porter somme toute sur le point de savoir s’il y a lieu ou non à une querelle : à commencer par le point de savoir si les 5 propositions condamnées figurent ou non dans l’ouvrage. Je vous renvoie au beau livre du regretté Bruno Neveu, L’Erreur et son juge . Le plus étonnant, c’est qu’une fois le scénario en place, il va se rejouer deux fois au cours du XVIIIe siècle. Au début du siècle, l’oratorien Pasquier Quesnel est de plus en plus désigné comme le successeur d’Arnauld à la tête du parti janséniste et son ouvrage le Nouveau Testament en Français accompagné de Réflexions Morales fini par être condamné par la bulle Unigenitus en septembre 1713 comme le nouvel Augustinus. Au milieu du siècle, reprenant le flambeau des curés appelants, c'est-à-dire des curés qui ont appelé au Concile général pour contester le jugement dogmatique de la bulle Unigenitus, les avocats et les magistrats des parlements, surtout le Parlement de Paris, se rangent sous l’étendard de la mémoire idéalisée de Port-Royal pour défendre les mourants privés de sacrements en raison de leurs opinions jansénistes.
Hérésie de la Réforme protestante ou fidélité à l’esprit de la Contre-réforme, crypto protestantisme, calvinisme rebouilli ou à l’inverse quintessence du tridentinisme à la française, voilà le dilemme insoluble autour duquel tourne la première discussion sur la nature du mouvement . Nous n’en sommes pas sortis ! Le néologisme de « jansénisme » constitue un piège pour les historiens qui sont ainsi requis de prendre parti. Le seul moyen d’y échapper est de tenter de comprendre historiquement les termes contradictoires du débat.
La controverse sur le « jansénisme » peut être considérée comme le révélateur des ambiguïtés de la doctrine du Concile de Trente. La refondation tridentine a voulu trouver un équilibre en repoussant d’un côté l’exaltation abusive du libre arbitre aux dépens de la toute-puissante divine promue par les humanistes mais aussi de l’autre côté l’exaltation excessive de la grâce aux dépens de la liberté de l’homme avancée par les protestants. Mais elle n’a pas donné le mode d’emploi de cette conciliation, de sorte qu’il est facile de comprendre que certains tendront plutôt à mettre l’accent sur la liberté d’œuvrer à son salut tandis que les autres exalteront plutôt la toute-puissance de Dieu.
Aussi convient il à mon sens de donner raison aux deux thèses en présence. Le jansénisme ne peut se réduire ni à un crypto protestantisme ni à un produit de la Contre-Réforme ou de la Réforme catholique comme les historiens préfèrent dire aujourd’hui, car il est les deux à la fois. Il est le symptôme par excellence de l’esprit de la Contre-Réforme à la française dans la mesure où il ne cesse d’exprimer, voire d’extérioriser spectaculairement ses contradictions internes, je pense au mouvement des convulsionnaires . En replaçant le Christ au centre de l’Église, la Contre-Réforme catholique a absorbé, à son insu, une bonne dose de réforme protestante. Le jansénisme surgit, avec les tensions qui le constituent, de la réaffirmation de la primauté du Christ, de sa présence et de sa parole, par l’école française de spiritualité pour reprendre l’expression de l’abbé Bremond . Il est un produit du christocentrisme à la lumière duquel celle-ci réinterprète le rôle de l’Église médiatrice. Le jansénisme aspire en effet à une réforme enracinée dans la parole et dans l’exemple du Christ .
De cette intégration du principe autonomisant du « droit divin » à tous les échelons de la hiérarchie de l’Église, il ne peut résulter qu’une gamme d’orientations divergentes qui vont s’exprimer au cours de son histoire : épiscopalisme (droit divin des évêques), particulièrement au XVIIe siècle, presbytérianisme (droit divin des curés) et laïcisme (droit divin des laïcs) surtout au XVIIIe siècle, dans le contexte de l’opposition à la bulle Unigenitus. On pourrait même ajouter « féminisme » dans la mesure où les jansénistes ont encouragé les femmes à lire l’Écriture et à se cultiver.
Cette contradiction religieuse a son pendant sur le terrain politique. Elle engage en effet le droit divin de l’État. Le jansénisme est l’absolutisme religieux qui va nécessairement de pair avec l’absolutisme politique. Il accompagne la monarchie absolue dans sa course tel un double. Dans les pays qui ont mené une politique cohérente de subordination de l’Église à l’État comme l’Autriche, l’Espagne, le Portugal ou certains états italiens, le jansénisme a discrètement accompagné, voire soutenu la politique des despotismes éclairés. Mais en France cette rivalité potentielle des deux souverainetés a pris un aspect de tension ouverte pour avoir été perçue comme telle, dès le départ, par Richelieu qui fait enfermer l’abbé de Saint-Cyran, vivant reproche de son alliance avec les puissances hérétiques. En France, le jansénisme a entrepris de défendre la monarchie contre elle-même, en tant que gardien de la toute-puissance divine dans l’Église et dans l’État. Cela en a fait le révélateur des tensions inscrites dans le système absolutiste. Un rôle qui va apparaître avec éclat lorsque l’absolutisme français se met en contradiction avec ses propres principes gallicans. C’est le sens de l’explosion suscitée par le bulle Unigenitus, laquelle, bien loin de constituer un sommet de l’absolutisme, en représente au contraire un recul, une « reculade » a même dit Jurieu . Cet abandon des libertés de l’Église gallicane par le roi laisse le terrain aux nouveaux défenseurs que leur cause va trouver, les jansénistes, les appelants, les avocats et les magistrats des parlements. D’ultramontain au XVIIe siècle, lorsque Richelieu s’était allié aux puissances protestantes, ou lorsque le roi s‘était opposé au pape durant l’affaire de la Régale, le jansénisme devient franchement gallican au XVIIIe siècle, par mimétisme envers le revirement de la position royale. Il ne s’agit nullement d’une volonté subversive, moins encore d’une montée de l’esprit révolutionnaire, mais d’une appropriation de la politique gallicane abandonnée par le souverain. Les parlementaires jansénistes défendent les droits de l’État contre la personne royale elle-même, au nom du droit divin. Ils sont en quelque sorte plus royalistes que le roi.
Sur le plan doctrinal le jansénisme se divise sans cesse en plusieurs courants qui ne font que manifester sa nature intrinsèquement contradictoire, tendu qu’il est entre les principes de la réforme protestante et ceux de la réforme catholique, ce qui explique notamment la grande division au moment de la Constitution civile du clergé entre ses partisans et ses détracteurs au sein même des derniers restes du parti.
Ses tensions internes mineront petit à petit le mouvement de l’intérieur, de sorte que l’on a pu parler de « l’agonie du jansénisme » au XVIIIe siècle . Mais malgré cette tendance mortifère et ses incessantes disputes le mouvement janséniste produit une mémoire fédératrice et identitaire qui va permettre à différents acteurs sociaux curés, laïcs, avocats, magistrats, de s’identifier à un idéal, de se fédérer sous le même étendard et ainsi au mouvement de renaître plusieurs fois de ses cendres. Cette mémoire survivra du reste à la disparition du jansénisme en tant que mouvement social.
Il n’y a pas de filiation naturelle entre le jansénisme du XVIIe et celui du XVIIIe siècle. Le jansénisme du siècle de Lumières procède d’une réinvention. Il est repensé et reconstruit en fonction du nouveau combat contre la bulle Unigenitus. Les organisateurs de la résistance, car il y a bien un noyau, un « parti » de théologiens, pour la plupart issus du séminaire oratorien de Saint-Magloire, ces opposants à la bulle Unigenitus vont chercher dans l’histoire de leurs prédécesseurs de quoi définir leur minorité identitaire. C’est ainsi qu’ils construisent la mémoire de Port-Royal, sur la base d’une méthode d’exégèse originale, le « figurisme », qui leur permet de donner un sens contemporain aux Écritures, assimilées à une histoire du peuple de Dieu par « figures » qu’il faut savoir mettre en correspondance et déchiffrer. Dans cette histoire sainte élargie, les solitaires et les religieuses de Port-Royal prennent la place emblématique du petit nombre des juifs convertis au temps du Christ, dont les opposants à la bulle se veulent la figure actuelle, la dernière branche vivante de l’Église sur laquelle l’ensemble des juifs viendront se greffer lors de leur conversion ultime appelée à rajeunir l’Église, à la renouveler avant la fin des temps . En face, la Compagnie de Jésus constitue le symbole de la guerre que les partisans de l’erreur mènent dans l’Église, guerre dont la bulle Unigenitus serait le dernier avatar, signe de l’imminente conversion des juifs. Même en petit nombre, les jansénistes figuristes se considèrent comme les « témoins de la vérité » , c’est ce qui leur donne le courage d’en appeler directement aux fidèles comme à un tribunal de l’opinion publique et de créer par exemple un hebdomadaire à grand écho social, les Nouvelles ecclésiastiques qui paraîtront de 1728 à 1803.
La grande particularité de l’opposition parlementaire des années 1750-1765 est de se projeter sur un écran fantasmatique, celui de la lutte entre « le parti de Port-Royal » et le « parti des jésuites », interprétation construite par les jansénistes figuristes dès la première moitié du siècle. Cette mobilisation de la mémoire des luttes religieuses va se révéler l’une des ressources les plus efficaces des jansénistes. Elle est orchestrée en particulier par un étonnant personnage, Louis-Adrien Le Paige, un avocat, figuriste et partisan des convulsions, qui devient le conseil du prince de Conti en 1757. Il faut comprendre que c’est cette puissance symbolique de la mémoire janséniste qui lui permet ainsi de jouer le rôle d’éminence grise de l’opposition parlementaire . Auteur de presque tous les manifestes de l’opposition, il transpose la vision figuriste du combat entre le parti des jansénistes et le parti des jésuites dans le domaine de l’État. Il identifie le Parlement de Paris à l’idéal de Port-Royal, martyr de la vérité, dépositaire des lois fondamentales de l’État. Il rédige notamment en collaboration avec l’abbé Coudrette une Histoire générale de la naissance, des progrès et de la destruction de la Compagnie de Jésus en France, avec l'analyse de ses constitutions , qui désigne les jésuites comme les ennemis par excellence de l’État. C’est encore lui qui propose leurs statuts à un examen politique et lance ainsi un séminaire national de lecture dans le milieu des magistrats qui publient en rafale des comptes-rendus des constitutions jésuites . Avec beaucoup d’ambivalence et de fascination, ils présentent la Compagnie de Jésus comme une nation autonome extrêmement dangereuse à l’intérieur de l’État français, une nation séparée de son souverain. Mais n’est-ce pas l’informulable désir des parlements de représenter la Nation ?
La victoire totale des parlements sur la Compagnie de jésus en 1764, loin d’ouvrir une voie triomphale au parti victorieux se soldera par son effacement de la scène. Le jansénisme parlementaire existait pour la défense de l’État contre un danger religieux qui en était venu à se concentrer sous les traits des évêques partisans de la Constitution Unigenitus, puis des jésuites. Il combattait le danger d’assujettissement à un pur despotisme d’essence religieuse mais il n’a jamais produit une doctrine constitutionnelle cohérente qui aurait pu constituer une voie alternative à la monarchie absolue. Le Paige reste un défenseur de l’absolutisme même s’il en fait jouer les contradictions internes entre l’État de droit divin et la personne faillible du souverain. Pendant la campagne des pamphlets contre la réforme judiciaire du chancelier Maupeou en 1771 , premier conflit politique important qui se déroule en dehors de la querelle religieuse, le jansénisme parlementaire n’est plus la seule composante de l’opposition et de plus, il passe le témoin aux états généraux dans la fonction de seuls représentants crédibles de la Nation auprès du roi. Il est hautement significatif qu’il s’évanouisse avec le rétablissement des parlements en 1774 au lieu de profiter de sa victoire. Victoire à la Pyrrhus en effet car il a bien contribué au développement de l’idée de représentation nationale mais il en est mort, désormais les cours souveraines ont définitivement perdu leur légitimité politique en dehors du conflit janséniste.
Si le jansénisme politique porte une part de responsabilité dans l’avènement de la Révolution, c’est parce qu’il a contribué à bloquer toute évolution de la monarchie absolue dans un sens représentatif et libéral. Il a empêché l’établissement de quelque corps que ce soit qui aurait pu constituer ne serait-ce qu’un embryon de contrepoids législatif, qu’il s’agisse des parlements eux-mêmes dans leur forme traditionnelle ou des organes prévus par la réforme Maupeou. Il a travaillé, en un mot à enfermer l’absolutisme dans ses contradictions et à exacerber celles-ci de l’intérieur. C’est en cela qu’il a été une force authentiquement révolutionnaire.
Le prétendu conciliarisme janséniste était tout aussi douteux que son soi-disant « constitutionnalisme » politique . Conscients de leur situation minoritaire, les jansénistes n’ont jamais voulu d’un concile des évêques, de plus ils ont affaibli l’autorité épiscopale en lui opposant le jugement de l’opinion publique puis en appelant comme d’abus de nombreuses décisions épiscopales. Dans l’ensemble, leur stratégie a contribué au renforcement du gallicanisme politique et parlementaire car ils se pensaient au service de la puissance religieuse propre à l’État. Tant que les jésuites étaient là, les jansénistes ont su instrumentaliser la sensibilité gallicane et antijésuite à leur profit. Mais l’éradication de la menace jésuite rend inutile sa défense de l’État, le jansénisme se trouve comme résorbé en lui, il perd sa raison d’être.
Faute de combattants, l’extinction des querelles politico-religieuses liées au Concile de Trente va laisser le champ libre à un pur gallicanisme politique d’opinion, beaucoup plus diffus dans la société et exclusivement soucieux des droits de la Nation en matière de contrôle de l’Église. Le jansénisme, en disparaissant comme force sociale, libère le gallicanisme, mais il lui transmet en même temps l’héritage fantasmagorique de ses haines. Il l’associe à une peur de la puissance spirituelle, désignée comme l’ennemi de la Nation, comme un État concurrent et rival d’autant plus nocif que situé au cœur même de la Nation, peur qui rendra ce patriotisme potentiellement fort peu « libéral ». En lui communiquant cette obsession de réduire une autorité ecclésiastique toujours trop consistante, matériellement ou socialement, il lui assigne en fait pour programme l’hégémonie pure de l’État aux dépens de la Religion. C’est en ceci que la suppression de la Compagnie de Jésus constitue la première étape qui va mener à l’abolition des vœux de religion et à la Constitution civile du clergé.
Ce ne sont pas les derniers jansénistes, soldats isolés et divisés d’une cause d’un autre âge qui vont précipiter la déstabilisation de l’État royal, ce sont les failles politiques internes de celui-ci. La querelle janséniste les masquait, c’est à son retrait que la monarchie ne survivra pas. Ce ne sont pas les problèmes religieux qui sont à l’origine de la Révolution française ou en constituent la matrice. Si religion il y a, dans la Révolution, c’est « la religion nouvelle » de la politique qui se retourne contre les croyances établies, comme Tocqueville l’a discerné . Sans doute les querelles religieuses, spécialement à partir de la bataille de l’Unigenitus, où le peuple des fidèles est pris à témoin, ont-elles contribué à ébranler la monarchie et à mettre la société en mouvement. Sans doute les jansénistes aussi bien que les jésuites ont-ils contribué, chacun à leur manière, volontairement ou involontairement, au développement des Lumières . Mais ils ont surtout pavé la route, ce faisant, à une mobilisation des esprits d’un genre bien différent : l’affirmation de l’autonomie, de la liberté, de la toute-puissance des hommes qui s’est exprimée en France sur le mode d’une violente rivalité avec la religion.
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